COMPAGNIE THEATRE DU COUP DE GUEULE

Un pays de fiction ? Peut-être l’URSS des grandes purges staliniennes… Un bateau, «L’Oubli », fait la navette entre des îles septentrionales et le continent. Deux passagères.

L’une a vu sa carrière et son amour brisés. L’autre rêve d’avenir. Leur voix et leurs vécus s’entremêlent. L’amitié naît. Peut-on s’y fier ?

L’Etat totalitaire comme force du destin. Une écriture, comme la musique, au-delà du discours idéologique.

Plongée fulgurante sur un univers redoutable, inimaginable et non imaginaire, dit-on, qui ressemble furieusement à quelque chose que nous soupçonnons, que nous savons.

C’est d’un doigt délicat, sans la moindre emphase, que l’auteur a décidé de frôler cette horreur. Sans cri aucun, sans imprécation, ni satire, par le chuchotement étouffé de deux femmes dans l’entrepont banal d’un navire quelque part sur une mer extrême orientale.

Leurs destinées se croisent ainsi à trois reprises. L’une achevée, l’autre d’abord à naître ; sans débat, sans discours, sans complaisance. L’auteur cerne comme par hasard un accessoire, un trait, un murmure, une main qui couds des décorations sur une vareuse, un regard qui scrute la mer ; et voila que se lève, au-delà, un monde, et quel monde : l’horreur d’un régime totalitaire, marqué de déshumanité.

Derrière ces quelques répliques, ces gestes pauvres, cet échange imparfait, derrière ce voyage en grisaille, ce vapeur banal qui n’accompli que la plus humble, la plus routinière des tâches, se profile un monde qui peut anéantir chaque être et être accepté dans sa simplicité, son horrible quotidienneté.

Il ne reste que la chanson d’Anna, un corps repêché dans l’eau froide et... le silence. La règle a triomphé une fois de plus.